Luz y Sombra

Vernissage

Le mistral souffle ce soir. Ça me rafraîchit. Ça me fait du bien après toutes ces journées de chaleur accablante durant lesquelles on sue, sans discontinuer, dans une moiteur poisseuse qui colle les cheveux à la peau. C’est infernal. Je suis sur ma terrasse et je profite de cette relative accalmie. Je sais que la chaleur va revenir, et avec elle la fatigue, la lourdeur, l’indolence et l’agacement.

Ce soir après le boulot, S m’a rejoint pour m’accompagner au vernissage d’un artiste marseillais d’origine gitane, PSZART. C’est hier, en passant sur la Canebière pour aller refaire ma carte de cinéma aux Variétés et ma carte de bibliothèque à l’Alcazar (les deux étaient fermés) que suis passé par hasard devant une librairie que je n’avais jamais vu et dans la vitrine de laquelle une grande toile m’a interpelé. Il s’agissait d’une grande toile de couleur vive représentant des artistes de flamenco chers à monc coeur : Camarón et Paco de Lucia ! Je me suis approché et j’ai vu d’autres peintures sur le thème du flamenco à l’intérieur. J’ai eu un énorme coup de coeur pour l’une d’entre elle : une peinture sur un support en bois, encadrée de noir, sur laquelle Paco et Camarón de la Isla se font face comme sur une photo tirée d’une vidéo bien connu des aficionados, et entre les deux artises, le peintre a glissé, toujours avec ces couleurs très vives, très pop, des titres de chansons et des symboles flamenco. Mon coeur a fait boom ! J’ai craqué. J’ai demande à la libraire quel était le prix de la toile, elle m’a répondu que le vernissage aurait lieu le lendemain et que l’artiste serait là pour répondre à toutes mes questions.
Alors ce matin, via Messenger (seul medium qu’il me reste pour communiquer depuis le vol de mon sac à main et de mon portable) j’ai proposé à S de m’accompagner. Il a accepté. Bon, il devait ensuite rejoindre sa colloc' russe/ ex date/ ex plan cul pour une autre soirée… (Je l’ai dans le colimateur cette fille. Quelque-chose me dérange, une toxicité, une hostilité envers moi. D’ailleurs je ne comprends pas ce qu’il lui trouve. Dans la mesure où je l’attire, je me demande ce qui l’a attiré chez elle : elle est grande, blonde, charpentée, elle doit au moins chausser du 41, une allure à couper des pins de Sibérie autour du lac Baïkal et à chasser le phoque au harpon… l’opposée de moi...)
Mais toujours est-il qu’il a passé ce petit moment agréable à la librairie avec moi. Il y avait de la sangria, pas mal de monde et du flamenco en fond sonore. J’ai parlé avec le peintre, un Gitan andalou d’origine pied-noir (Oran et Bezirte en Tunisie, décidément...). Je lui ai dit mon coup de coeur pour la fameuse toile sur laquelle Paco et Camarón se regardent. Il m’en a donné le prix : 120 euros. J’ai évidemment dit que je l’achetais.
En plaisantant, j’ai dit à S qu’il découvrait ce soir mon sens des priorités : j’ai tout perdu, on m’a volé mes biens et mise dans la merde, mais j’achète quand même une toile car elle m’appelle beaucoup trop. Elle comble un besoin d’identité en moi. Ça l’a fait rire. Il était beau ce soir, tout en noir, bronzé, les cheveux lâchés. Dans la rue, un homme l’a interpelé en arabe, il a répondu dans cette langue, je l’ai trouvé sexy.
J’ai également sympathisé avec la gérante et fondatrice de la librairie. On va se revoir. Je lui ai proposé d’animer des ateliers de poésie franco-espagnol car il y a beauoup de ce genre d’activité dans ce lieu. C’était chouette, je suis contente. Cette soirée m’a fait du bien. C’était court mais enrichissant, salvateur. Ça m’a sorti du marasme dans lequel je me trouve embourbée depuis lundi soir. Depuis le vol...
Ainsi, dans la dénommée Grande librairie internationale de Marseille, rue Vincent Scotto, il y a une toile exposée avec une vignette où il est écrit vendue dessus. C’est la mienne. Ça ne pouvait pas plus mal tomber. Ça ne pouvait pas mieux tomber.